Nous nous sommes rencontrés dans l'Aveyron, il y a de cela bien longtemps... Quoiqu'il en soit, à un moment donné sur le Larzac nous avons rendu les clés de la maisonnette avec tout le confort en 2007. Nous ne sommes pas partis pour des raisons économiques, car nous avions chacun soit un travail soit une entreprise à gérer. Nous nous sommes retrouvés sur l'envie de vivre une nouvelle aventure. Il s'agissait d'ouvrir une parenthèse, et d'expérimenter la vie en cabane, dans la forêt. Nous étions motivés par le fait de se retrouver immergés dans la nature et de nous construire une cabane comme dans nos souvenirs d'enfant. Nous formions une toute jeune famille et nous souhaitions vivre dans un environnement sain et paisible, au vert ! où nous pourrions prendre le temps de vivre ensemble. Cette vallée d'Ariège et la façon de vivre de ses habitants nous a inspirée !
Durant l'année 2006, avant de nous installer, nous venons le week-end et commençons à défricher un coin de forêt, à assembler les premiers chevrons. Lorsque nous nous installons en 2007, Maya a tout juste un an. Nous projetons alors de passer une année dans la cabane, et de voir...
Nous sommes en plein milieu de la vallée, "l'enfer vert" ! Quinze minutes de marche sont nécessaires pour accéder au terrain, situé à 850 mètres d'altitude. Notre petite cabane de 20m2 suffit à nous accueillir pour l'instant mais nous commençons déjà des extensions et nous y mettons toute notre énergie. Il faut porter les matériaux sur le dos... Il nous faut aussi devenir autonome en énergie car nous sommes loin d'un quelconque réseau. Nous sommes à la bougie pendant un an et la cuisinière nous permet de passer les premiers hivers. Voir la toiture en bardeaux réalisée avec des chênes de la forêt terminée, est un grand plaisir. Nous jardinons ce coin de nature sauvage. Nous avons toute la liberté et l'espace pour nous exprimer.
Nous nous sommes sentis accueillis dans cette vallée, peuplée de nombreuses familles. L'entraide et la convivialité sont présentes, du fait que nous ayons tous les mêmes conditions de vie.
Au printemps 2008, Prune est née. Une bouche de plus à nourrir, mais des bras en plus pour aller chercher du petit bois ! Ces conditions de vie nous ont paru avoir un effet positif sur nos enfants, quant à la ténacité et au goût de l'effort. Le retour de l'école, surtout l'hiver, demandait parfois du courage et beaucoup d'énergie. Il y a aussi le plaisir de voir nos enfants circuler librement par les sentiers de maisons en maison pour se retrouver et jouer.
Nous vivons avec les saisons, au coeur de la nature. Nous entendons les arbres craquer l'hiver et les voyons renaître au printemps.
En parallèle, nous créons une association dont l'objet est l'intégration des personnes en difficulté. Rapidement nous commençons à accueillir de petits groupes sur notre lieu. Ils partagent notre quotidien, soin aux animaux, jardinage et découverte des activités de plein air comme la spéléo ou le V.T.T. Cette activité permet de créer cinq emplois à Massat six mois par an. Elle doit se pérenniser après notre départ.
Mais la montagne, c'est aussi de "l'énergie brute" : froid, humidité, efforts physiques. Les tâches au quotidien, les déplacements, demandent plus d'investissement personnel et de temps. Dans le couple, l'interdépendance est forte et la répartition des tâches, par la force des choses, revient à un modèle plutôt traditionnel…L'isolement peut en découler. Ce mode de vie est difficilement conciliable avec un emploi à l'extérieur, car il faut être à deux pour vivre là-haut, selon notre expérience !
La parenthèse se referme aujourd'hui, nous repartons vers de nouvelles aventures.
En quittant ce lieu et ce mode de vie, nous laissons une autonomie énergétique et en partie alimentaire, qui a fait que nous avons vécu avec moins de besoins d'argent, et donc plus de liberté et de temps pour faire ce qu'on avait envie de faire. Profiter de la vie en montagne, jardiner, élever des poules et des brebis, partir en voyage, faire de la spéléo ou du parapente, faire un sauna et manger que des bons produits ! Le luxe ! Ce luxe là demande des sacrifices qui s'avèrent facile : pas de télé, plus de frigo, plus de queue au supermarché, quasiment plus de factures…
Mais pour Chloé il s'agit de retrouver une indépendance, et autonomie, sortir du rôle traditionnel de la femme, qui fait les confitures, qui s'occupe des enfants, du jardin, des conserves, des animaux, des foyers pour chauffer la maison et l'eau ! La vie moderne n'a pas que des mauvais côtés…Laurent a d'autres projets professionnels et peut-être aussi une nouvelle construction un peu alternative en vue...
Surement ces sept années de vie sur les hauteurs de Massat resteront pour nous une expérience d'une grande richesse. Nous avons pu renoncer à beaucoup de superflu et profiter un plus de la vie... Penser à la société pressée et compressée nous faisait sourire et apprécier notre choix de vie à sa juste valeur. Mais la vie est courte et nous souhaitons vivre d'autres aventures...
Enfin nous avons pris le temps de voir grandir nos enfants. Mais il nous suffisait de penser aux gens coincés dans le métro ou le R.E.R. pour que tout devienne finalement agréable. Une vie plus simple et subversive, à l'opposée des sentiers battus par le monde de la pub et de la consommation.
Dans ce monde où tout est fait pour gagner du temps, où l'on travaille pour payer une voiture laquelle vous sert à aller bosser, qu'il est bon de prendre le temps de faire son bois. Repérer l'arbre sec sur pieds à débiter... le ramener près de la maison, le fendre et le stocker bien au sec... Avec la gestion de l'eau captée avec un mauvais tuyau dans le ruisseau plus haut, celle du bois devient un réflexe. Avec tout ça pas besoin d'aller courir pour le plaisir de courir. Plus le temps ni l'énergie ! Et dans ces contrées un peu loin du tout pareil, il n'est pas grave d'avoir une voiture pourrie ! Et lorsqu'on vous sucre le ramassage scolaire pour vous forcer de descendre de vos montagnes, on résiste, bien sûr !